chez Nicolas Bokov

NOUVEAUX ECRITS ~ PUBLICATIONS ~ ARCHIVES bokovnicolas@yahoo.fr

Ma photo
Nom :
Lieu : Paris, France

24.4.05

Mes Invités du Mois

Vladimir Batchev (Frankfurt). Carnets d’un parasite social


Владимир Батшев продолжает издавать
ежемесячник "Литературный Европеец"
и толстый ежеквартальник "Мосты".
Удачи, интересных авторов
и побольше подписчиков!
говорят ему парижские друзья.

Ниже следует отрывок из его книги "Записки тунеядца", вышедшей в Москве в 1995 году,
опубликованной в парижском журнале "АнарТист".



[Cet extrait a été publié dans la revue Anartiste (N°5, Paris 2005) sous le titre:
59 minutes de liberté : le 14 avril 1965 à Moscou]

La veille, Goubanov était nerveux. Il relisait des slogans qui seront transcrits cette nuit sur des draps. Il murmurait quelque chose.
– Il faut téléphoner aux journalistes étrangers, dit-il brusquement. Si non, personne ne saura rien de notre manif.
– Tu connais l’anglais ? – demanda-je Anatole Kalachnikov. Parmi nous, il passait pour un polyglotte.
– Oui.
– Pourras-tu dire : « Venez à la place Maïakovski, il y aura une manifestation littéraire du cercle poétique SMOG ? »
Il bougea des lèvres, et dit :
– Je le pourrai.
– Alors, c’est toi qui vas téléphoner à l’ambassade américaine.
– Vous avez le numéro ?
On a trouvé le numéro dans le carnet de quelqu’un.
– Je demande qui.
– L’attaché de presse. On s’en fiche de son nom ! Tu diras et ça y ira.
– Mais leurs numéros, à l’ambassade, sont sur écoute, sûrement.
– Tu téléphoneras le matin, juste avant la manif. Attention ! d’une cabine publique.
Le matin, nous étions en train d’écrire un programme de SMOG et une pétition à l’Union des Ecrivains soviétiques. On ne réclamait pas grande chose; seulement :
1. Reconnaître SMOG : organisation des jeunes écrivains, indépendante de l’Union officielle ;
2. Accorder à SMOG un lieu de réunions et de spectacles.
– Il est temps, dit Marc.
Nous avions mis les morceaux de tissu avec des slogans sous nos vestes, et nous étions parti à la place Maïakovski.
Près du monument du poète, il y avait déjà du monde
Nos amis, et parmi eux Nathalie Gontcharov, svelte, terriblement belle, souriante, qui n’était pas amoureux d’elle ? Anne Danziger (à nos jours, auteur des chansons populaires). Mais les nôtres… Aleïnikov, n’était pas là… Goubanov, non plus…
Nous les avons attendus une quinzaine de minutes. Les supporters arrivaient ; voici Panov (diable ! il épousera la fille de Tchernenko), Anatole Kalachnikov, Sacha Vasutkov, un copain, et d’autres. Mais Goubanov et Aleïnikov, toujours pas.
– Il est le temps de commencer, le public est là, Ouroussov me poussa vers le monument.
– As-tu rappelé à l’ambassade ? – demandai-je Kalachnikov.
– Rappelé, fit-il.
Goubanov n’était pas venu.
Aleïnikov non plus. Zut ! On l’avait arrêté pour une histoire de bistro !
Mais Goubanov, lui !..
J’étais monté sur le socle et avais commencé à parler (aujourd’hui, je ne me souviens plus de quoi ; Vasutkov, en 1988, me rappela: « Vous savez qu’ils ont tué Maïakovski, disais-tu. Pour éviter un sort semblable, nous allons tout de suite à la Maison des Ecrivains pour leur transmettre notre pétition ».)
Je ne m’en souviens pas.
Je parlais sans texte écrit, à l’improviste.
On raconta aussi que je déclamais des vers.
Ensuite, je trouvai Kalache à coté de moi, je sortis une banderole cachée sous mon imperméable, et je la lui donnai. Il y était écrit : ARRACHONS LES BOUTONS DES THEMES ET DES IDEES DE LEUR UNIFORME STALINIEN.
Kalache l’avait pendue sur sa poitrine – on dirait, un cliché des chômeurs occidentaux si fréquent dans la presse soviétique : je cherche du travail. Il marcha à coté de moi.
Ouroussov et Marc Jankélévitch avaient dévoilé leur panneau : NOUS ALLONS MARCHER PIEDS NUS ET CHAUDS !
En tout, il n’y avait qu’une douzaine des SMOGuistes, cependant, tous voulaient venir, une quarantaine. J’espérais qu’ils viennent (toujours, cet espoir fou…)
Furent présents une cinquantaine des nos connaissances et des petits chefs (ceux qui aidaient à organiser les soirées SMOG, ainsi les baptisa Goubanov.) S’ajoutèrent environ deux cents étudiants de l’Université, de l’Institut Pédagogique et d’autres, j’en avais reconnu plusieurs.
Pendant notre marche, différentes personnes commençaient à infiltrer la foule et notre groupe, ils avaient l’air sportif, les poings serrés. Soudain, ils se jetèrent sur Ouroussov et Jankélévitch et leur arrachèrent le panneau.
– En avant ! – criai-je. – Ne vous arrêtez pas ! C’est une provocation !
Les étudiants avaient bruyamment protesté. Pour un moment, les gars du k.g.b. cessèrent toute action, mais ensuite quand Vasutkov pendit un autre panneau sur son cou, RUSSIE TU ES UN BAISER GELE, ils se jetèrent sur lui. Repoussant l’un d’eux, il se cacha derrière Ouroussov. Les étudiants hurlaient, une mêlée s’était produite. Vasutkov en sortit protégeant son panneau avec les mains, et nous avancions.
Au niveau de l’hôpital Filatov les agents du k.g.b. se jetèrent, comme s’ils obéissaient à un ordre inaudible, sur les porteurs des panneaux. Ils déchirèrent tout en loques. Je savais que Jankélévitch garda encore le dernier, des plus séditieux, DEFLORONS LE REALISME SOCIALISTE. Il le réserva pour la Maison des Ecrivains.
Nous avions approché du passage clouté.
Des cris se levèrent dans la foule :
– Avançons, on traverse plus loin ! Plus loin ! Ce n’étaient pas les nôtres qui criaient. Nous criions qu’il fallait traverser ici la rue Sadovaya, mais eux, ils crièrent plus fort, et une partie de la foule trompée par les mouchards, alla plus loin. Nous commencions à traverser là. De l’autre côté, je regardai derrière : le nombre de manifestants diminuait encore.
Il y en avait qui ayant pris peur, se détachèrent. J’en avais vu d’autres s’éloigner calmement sur le trottoir, riant, parlant entre eux, ne prenant pas les événements au sérieux.
– Allons plus loin, à l’Union des Ecrivains ! – cria-t-on dans la foule. Mais oui ! crièrent eux. Et encore une partie de la foule les suivit.
– A la Maison des Ecrivains ! – cria Panov, ainsi que les nôtres déjà décimés. Le fleuve nous porta, nous ne pouvions plus rien. D’un coin d’œil je vis deux agents en civil se jeter sur Vasutkov, et son panneau disparu avec lui.
Le dernier panneau était encore intact, celui de Jankélévitch, je m’en souvenais. Moi, j’avais la pétition et le programme de SMOG, que nous devions remettre aux écrivains soviétiques, coûte que coûte.
Je marchai déjà seul entouré des cinq agents en civil, et je compris que je ne partirai pas impuni. Les arabes inquiets regardaient par les fenêtres de leurs ambassade, ils pensaient peut-être que l’on ramena du monde pour manifester contre eux. Non, cette fois c’était contre leur voisins d’en face.
Nous étions devant la Maison des Ecrivains.
J’avais lu la pétition.
On m’avait applaudi.
Pendant une seconde, je crus que tout passerait bien, sans conséquences graves, que je rentrerais calmement à la maison. Je portai la pétition à la Maison des Ecrivains. Sur le seuil, un poète officiel que je connaissais, m’attendait.
– Victor Ourine, dis-je, vous me connaissez, voici notre pétition pour l’organisation des écrivains moscovites, je vous prie de la leur remettre !
Il barbouilla quelques mots, prit la pétition et disparut à l’intérieur de l’immeuble.
Je sortis dans la rue. On me donna un coup fort et je tombai sur les marches, on me tordit les bras. Et puis – je vis Morozov, venu Dieu sait d’où, costaux, de grande taille et poète. D’un coup de poing il projeta le k.g.biste par terre, et cria :
– Vladimir, sauve-toi !
Je sautai vers la rue Sadovaya, mais eux, toujours plus nombreux, me rattrapèrent et me traînèrent vers la voiture, et me tassèrent dedans. Je remarquai Ouroussov essayant d’ouvrir la portière de l’autre coté, mais on le rejeta cruellement. La voiture démarra brusquement, étant serré contre le siège, je ne cherchai pas à me libérer; impossible.

<>
Extrait de son livre «Carnets d’un parasite social » (Moscou, 1994), traduit du russe par Nicolas Bokov et Marie-Claude Thébaud. Au moment des faits, Bokov se trouvait à l’hôpital psychiatrique militaire à Khabarovsk ; Thébaud, future poétesse, entamait ses études primaires en chère Bretagne libre.

Batchev (né en 1947) avait été condamné à 5 ans d’exile en Sibérie. SMOG, ou la Plus Jeune Société des Génies, imitée ensuite par les jeunes de l’Europe. Certains étaient venus à Moscou brejnévienne, pour manifester en soutien des littérateurs emprisonnés. Découragé par l’évolution sociale de la Russie actuelle, Batchev émigra à Francfort. Editeur, il publie, en russe, Les Ponts, trimestriel littéraire, et un mensuel L’Européen littéraire.

Contact : lit-euer@gmx.net Voir son site : www.le-online.org

23.4.05

Marie-Claude Thébaud (Paris). Un regard épiant une présence sur le quai...


Nouveaux recueils
de Marie-Claude Thébaud
avec le postface de Claude Duneton
et Nicolas Bokov


aux Editions Lucile
Paris, 2005




Un regard épiant une présence sur le quai d’une gare.

Insolence des regards violant l’instant où deux êtres éperdus d’amour
se rejoignent.

Seulement deux, là, noyés dans l’inconnu des multiples présences.

Immensément deux dans cette foule.

Bulle d’amour générée par l’aura des retrouvailles.

Instants intemporels.
Immortalité des effusions.
Inconvenances du geste.
Indécence ?

Incompréhension.

Jugements… dans les regards.
Jugements précaires,
Jugements arbitraires,
Jugements.

Et quelques miettes de condescendance.
Ironie ?..
Tache de bonheur sur l’amertume des jours.

[Du recueil « Là-bas»]

Pour lire plus:
http://mcthebaud.blogspot.com



18.4.05

ENVIE DE PROSE 2

*
O, pourquoi moi
et pas quelqu’un d’autre ?
O pourquoi moi
et pas celui-ci ?
O, pourquoi lui
et pas moi ?
O, pourquoi lui
et pas quelqu’un d’autre ?
O, pourquoi quelqu’un ?


*
Mon grand-père a vécu 76 hivers
Ma grand-mère a vécu 67 automnes
Ma mère a vécu fifty-fifty
Mon cousin a vécu 14 étés
Il n’a pas survécu à son seul printemps
Que dire des autres qui ne laissent pas de traces



*
Le crépuscule
s’annonce
je veux te dire
non je veux t’embrasser
attend
chérie
as-tu soif
tu entends ?
c’est le téléphone
non
c’est le vent
le vent
souffle
ferme la porte
s’il te plaît
ferme les yeux
la paix là
là bas la guerre
ils parlent eux
nous aimons
donne-moi
ta main
Dieu
existe ?
Dieu
existez
je vous en prie



*
Je vous ai raconté ce que vous craigniez
Et vous avez détourné le regard
Je vous ai dit ce que vous êtes
Et vous avez crié au scandale
Je vais vous montrer de quoi vous rêvez
Et vous prêterez l’oreille
Je vais vous donner des rêves à sucer
Et vous remplirez le stade
Le stade, oh !


SOUVENIR

La lune était verte, l’air toujours plus frais
cette nuit lointaine où ma jeunesse se finit
sur le terrain vague les couteaux scintillaient
la neige brillait à faire mal aux yeux

oh ! les soucis du monde étaient si lourds
et le cœur du marcheur oubliait de battre
il suppliait pour une journée de plus
il faisait plier ses genoux jusqu’à terre

car cette nuit la vie était très courte
chaque pas, un cadeau du ciel
les lèvres gercées proféraient des paroles
suppliant, Dieu sait qui, d’éloigner la coupe



*
Le vers ïambique et même l’alexandrin
font penser aux jeux des ados,
mais mon regard s’amuse encore
à voguer vers l’horizon
vers son azur doré

la curiosité évadée, je contourne les tas
d’observations laborieuses, d’œuvres et de livres
qui ressemblent aux affaires de déménagement
tables et chaises partout les mêmes, ô Seigneur
comme ce figuier lugubre dans son pot ou
l’aquarium avec son poisson rouge frangé

alors ils survivent, et ils vivront encore
amasseront ceci et cela, et nous
nous aurons le temps de nous arrêter
respirer l’air frais vespéral
laver nos yeux avec des souvenirs
de ceux qui tant nous aimaient
que nous aimions tant


*
l’âme ! veux-tu raconter
que cette heure du destin
ressemble à une soirée exquise
quand l’air frais et suave
caresse les poumons ?
l’âme, oses-tu raconter
les choses vues ailleurs
l’exclamation et le soupir
entendus la-bas ?

Oh, l’humble automne
ta douce nudité flétrie !
l’élan printanier de fécondation
aboutit à une production modeste.
Oh, l’humilité de l’automne,
remplis mon cœur, mon âme,
mon œil.


*
Une fois de plus on s’en tirait
et notre vie se propulsait
encore un peu vers sa fin
réussie et heureuse.

Une fois de plus nous n’avons pas cru
ni charmeurs ni menteurs
ni anciens ni futurs
collecteurs de sous.

Nous nous sommes Dieu merci procuré
un brin d’amitié une bribe d’amour
suffisamment du bleu de ciel
et d’air pur assez pour un soupir entier.


*
air, simplement
la pureté d’eau
la douceur de la terre
le feu, l’irrévocable
la terre, je lui lègue
mon ami le corps

qu’elle le berce

je le confie au feu
pour une brûlure ultime

mes quatre compagnons
je vous laisse

je vous laisse mon frère fatigué
mon corps endormi


*
ma sœur bonjour je suis ton pharaon
mon amie fidèle
mon épouse macabre
ma misère, bonjour !

viens me couper le regard
sur un genoux trop rond
de ma voisine temporaire
dans le wagon du métro

transforme le pain sec
en un plat royale exquis
l’eau de robinet en eau de source
des dieux paresseux olympiques

viens améliorer mes pensées
élucider ma morale
rafraîchir ma philosophie
viens la fortune indicible
de tous les misérables du monde
viens, ma Misère, la richesse de Dieu

mais n’oublies pas de tes congés


*
se taire et attendre

attendre se taire tendrement et atteindre
s’entendre et attendre après

atteindre se taire et attendre tendrement
attendrir et attendre se taire

atteindre tendrement et se taire
se taire tendrement et atteindre

se taire attendrir et atteindre tendrement et attendre

atteindre et se taire tendrement

atteindre

et se taire et se taire et se taire
et – se – tai – r – a !


*
ce que vous dites à propos du monde
vous situe dans le monde
ce que vous dites à propos du monde
ce n’est pas ce que le monde est
ce que vous dites du monde
c’est ce que vous êtes dans le monde
vous êtes dans le monde ce que vous dites du monde
vous êtes dans le monde ce que vous dites
qu’est-ce que vous donc dites ?


17.4.05

BIO BIBLIO GRAPHIE

Né en 1945 à Moscou, Nicolas Bokov étudie la philosophie et la science sociale. Parallèlement, il est très vite impliqué dans la dissidence. Il s’approche de SMOG, un groupe de jeunes auteurs contestataires. Il participe à l’organisation du samizdat, ce média clandestin de l’époque communiste, y publie ses propres ouvrages (nouvelles, théâtre, poésie); certains, signés d’un pseudonyme passent à l’Ouest: Nikto (Personne), La Tête de Lénine, La cité du soleil ou encore Les prodiges de la chimie, pièce de théâtre traitant l’utilisation de la psychiatrie dans la politique. Dénoncé, Bokov doit choisir en 1975 entre la prison et l’exile. Il s’installe en France, voyage aux Etats-Unis et en Europe, fonde une revue littéraire «Kovtcheg» (l’Arche de Noé). En 1982 il découvre la foi chrétienne et abandonne l’écriture. Après un long «voyage d’étude» à pied et en stop, en Israël et en Grèce (Mont Athos), il regagne la France en 1988. Il vit dans la rue et dans les carrières abandonnées, y voyant une forme d’ascèse. Son récit Dans la rue, à Paris (1998) relate cette période. Il publie Déjeuner au bord de la Baltique, un adieu à son passé dissident et aux amis disparus. Son expérience de la foi est racontée dans La Conversion et La Zone de réponse. Il vit actuellement à Paris, continuant d’écrire dans sa langue maternelle. Il est traduit en anglais, allemand, italien et polonais.

Bibliographie

2005: Or d’Automne et Pointe d’Argent. Conversations avec Victor Koulbak. 14 ill. Ed. Noire sur Blanc.
2005: De tout un peu /Тодасё. 16 poèmes japonisants. Bilingue. Ed. Lucile, Paris.
2004 : A l’est de Paris, nouvelle. The New Review, N°237, New York.
2003 : La Zone de réponse. Ed. Noir sur Blanc.
2002 : La Conversion. Ed. Noir sur Blanc.
1999 : Déjeuner au bord de la Baltique. Ed. Noir sur Blanc.
1998 : Dans la rue, à Paris. Ed. Noir sur Blanc, Montricher/Paris.

1983 : Der Fremdling, roman. Diogenes Verlag, Zürich.
Wirren aus neuester Zeit oder Die erstaunlichen Abenteuer des Wanja Tschmotanow. Id.
1982 : La Tête de Lénine (préface d’Alexandre Zinoviev). R.Laffont, Paris.
1979 : Best-seller (et autres choses), version russe. Ed. Kovtcheg, Paris.
1978 : Omozolelov’s Passions. New Writing & Writers, J.Calder, London.
I nuovi torbidi. Jaca Book, Milano.
1975 : Nobody. John Calder, London. (Réédition Riverrun Press, New York, 1979).
1974 : Le tape-cul du destin (avec le peintre Konstantin Bokov). Samizdat, Moscou.
1973 : Nikto (Personne). Denoël (traduction du texte de Samizdat : Moscou, 1966).
1972 : Le rire après minuit. «Grani», Francfort a. M., N°85 (signé Basile).
Les prodiges de la chimie. Pensée Russe, Paris (signé Basile).
1971 : La Cité du soleil. «Grani», Francfort a. M., N°81 (signé Evous).
1970 : Smouta noveichego vremeni, ili Oudivitel’nye pokhojdenia Vani Tchmotanova. La Presse Libre, Paris (première parution de La Tête de Lénine).

ENVIE DE PROSE (POEMES)


*
si tu meurs le premier
tu viendras me chercher
tu es folle
si je meurs la première
tu es folle
je viendrai te chercher
ô, tu es gentille



CONVERSATION DANS LE CREPUSCULE

je me sens en sécurité
quand tu touches mes oreilles

je me sens chez moi
quand tu fermes mes paupières
avec tes doigts de fleurs d’amandier

je me sens rassuré
quand tu poses tes lèvres
sur mon épaule

je me sens belle
quand ton regard se remplit des larmes

je me sens heureux
quand tu dors sur mon bras

je me sens ému
quand tes cheveux picotent mon visage

je te sens fragile
quand je vois les creux de ta colonne vertébrale

je me sens ému
quand tu es toute humide
je me sens jeune
quand tu es contente

je me sens déçu
quand tu t’habilles

je me sens éternelle
quand tu dis
que ferons-nous cet été
je me sens immortel
quand tu dis à bientôt


*
les anges nous gardent
Dieu nous regarde
la mort nous guette
l’amour nous sauve
la gloire tarde
le temps nous farde


*
savoir déceler un battement de cœur d’un émigré dans la remorque
sache, Douanier, déceler un battement des corps dans la remorque
savons-nous déceler un battement de cœur dans le remord
sais-tu déceler un remord dans le battement de cœur
ils savent déceler le battement
savez-vous déceler le cœur dans le corps
savoir déceler un cœur dans le cœur




à M.C.T.

Tu es le printemps
de mon automne
Tu es l’automne
de mon hiver
Tu es l’hiver
de mon enfance bénie
Tu es l’enfance
de mes flocons de neige
Tu es la neige
de mon oublie
Tu es l’oublie
de mon irréparable


*
Chérie attends moi
Attends moi
Attendez moi
Attendez

Attends moi fils
Attends
Ma fille
Je t’attends
Ma fille bien-aimée
Je t’attends

Je t’attends ma comment dire
Attendez je l’attends excusez-moi
Je l’attends moi, attendez
Ma mort
Je l’attends attendez ma mort
Je l’attends chérie attends moi
Attends moi chérie je l’attends
Attends moi chérie pour que je ne l’attende plus


*
Prise de vues
Prise de son
Prise de sang

Ma gorge prise

Prise de téléphone
Prise de contact


Prise de conscience (rarement)




à Pilote le Hot

tu sais où tu habites
sais-tu en qui tu habites
qui t’habite ?
tu habites tes habitudes
prend l’habit
là où tu habites
prend l’habit
de tes habitudes
tes habitudes t’habitent
t’habitent
en qui tu habites
en qui habitent tes habitudes
sauve qui peut



PREMONITION DE MADRID

salle d’attente
salle d’attente
attention
attention
merci
merci

merci de votre attention
merci de votre attente
dans la salle d’attentat
sans merci
attention
attention
à la merci de votre attention



*
attends
je vais te dire
je veux te dire une chose
tu comprends
comprends-tu
une chose
une seule chose je te dirai
une seule, je te dis
écoute cette chose-là
tu comprends
la chose
je te dis
as-tu compris ça
ce que je t’ai dit


*
bandes dessinées
des bandes décimées
bande de quatre
bande de quatre dessinés
la violence, le pognon et la bouffe
et Tintin dans le pupille, dans l’oreille
et dans la cervelle


*
Donnez-moi un atome de l’immuable
et je vous bâtirai un paradis.

Dites-moi votre vérité qui est toujours vrai
ou votre mensonge qui est encore faux
votre audace qui n’est pas encore fade
votre tristesse toujours fraîche
un geste d’amour à jamais intense
un mot de compassion éternellement vivante

le bruit d’un pas de votre enfance
le cher sourire de vos disparus



ETC.

Lus au cours de soirées SLAM. Mes lieux préférés:

# l’Abracadabar (3ème lundi, 20h30-22h30), 123, av J.Jaures 19°.
Animation Koan.
# L’Usine galerie (1ère samedi, 20h30-22h30), 102, bd de la Villette 19°.
Animation Angel Pastor.