à I.J.
Il y trouve du miel, cela rime, un bocal d’apiculteur de
la Creuse, il la connaît il y était et il y écrivait un poème, en attendant le
bus qui y passait une fois par jour,
et encore du miel, spécial, libellé « miel et
noisettes », oh combien doux, prévu pour le petit-déjeuner, n’est-ce pas,
après une nuit remplie d’étoiles, de souffles d’une brise, bon prétexte de
proposer sa veste à elle, et puis, de lui mettre le bras sur l’épaule;
et encore, du thé signalé « Noël à Venise »,
tiens-tiens, très parfumé, vanillé, avec une note de sévérité d’agrume, ah la
Venise, la ville antique et ancienne de noces, littéraires ou réelles, la ville
de quelques tombes célébrées par les amateurs de la poésie russe;
une boîte de bonbons (magnifiques, pense-t-il) décorée
d’une petite Licorne dorée, qui fait allusion à la Dame des gobelins, à la lumière
tamisée de la salle du musée;
une paire de chaussettes avec de jolies écrevisses, son
signe de Zodiaque, évidemment, connu pour sa timidité et sa réticence,
exagérées, menaçant le bonheur naissant de gestes audacieux rêvés,
un paquet des photos, mais oui, prises lors de leur
rencontre à Paris, imprimées sur papier brillant, le petit paquet mentionné
« moments inoubliables », et c’est vrai, c’est la chaleur de l’été,
le soleil, la robe lumineuse que faisait deviner les lignes du linge noir,
une photo encadrée avec un support, on peut la mettre sur
la table de travail ou sur un commode, on y sont tous les trois, lui au milieu
entre elles, une riante et l’autre souriante énigmatiquement;
un cahier de grand format qui pourrait servir de journal
de bord si le voyage imaginaire devenait réel, les pages lignées pour qu’il
écrive correctement, la couverture du cahier décorée d’une aquarelle,
« Honoring Sylvia Wang », le nom connu d’une pianiste virtuose jouant
aussi sur le clavier puissant des désirs, avec son dos hypnotique, avec ses
cuisses envoûtantes, ainsi la volupté de mélomanes double leur plaisir
d’écouter la suite magique de sons de Schumann;
une enveloppe avec une carte de Noël, un petit sapin
sympa et des flocons de neige étincelants, couverte d’une jolie écriture,
« Cher… j’espère que ce petit colis vous fera plaisir… », et comment,
il se sent Robinson Crusoe admirant ses trésors rescapés du naufrage;
et ce n’est pas tout ! mais on fait une pause en
relisant la lettre, buvant du thé « Noël à Venise », regardant les
photos de l’été passé…
Pour découvrir ensuite un calendrier – pour l’année 2019
composé des 12 images de jardins paradisiaques, roses, lilas, herbe
printanière, pans de ciel bleu et profond à s'y noyer;
un chausson rouge de Noël, flamboyant neuf, comme il le
faut la veille du renouvellement annuel, pour y mettre, pense-t-il, ses
économies littéraires restreintes;
et encore des chaussettes, trois paires, en signifiant
peut-être que l’hiver sera long, qu'il n'est plus saisonnier,
et une paire des chaussettes – pare-balles, oui,
renforcées avec des fibres Kevlar ! Est-ce une allusion au mouvement des
gilets jaunes et au danger policier dans son quartier proche de la
République ? L’intuition féminine est plus sensible et franche que les phrases
perfides des gens aux rênes du pouvoir;
ensuite, une écharpe mohair luxueuse, délicatement
tricotée qui garde encore la chaleur de la tendre main, qui s'arrêtait parfois
laissant des souvenirs passer devant ses yeux, des réflexions aussi sur notre
destin de mortels;
et puis, un livre qui vaut des volumes! qui révèle le
grand secret de deux derniers siècles, vous devinez bientôt lequel, c’est l’identité
du modèle du tableau de Courbet, je vous dis à l’oreille son titre,
« L’origine du monde » ! « L’énigme est enfin
résolue !.. – écrit la main forte amicale de son écriture délicate,
et enfin – la cerise sur le gâteau, du fond du colis sort
un merveilleux sac de courses, pour l’accompagner désormais dans sa chasse aux
légumes et fruits…
La bonté même des Muses, Amie de Saint-Nicolas et du
Père-Noël! Il n'ose pas la nommer de son nom laïque, il murmure seulement:
messagère d'Euterpe et d'Erato, merci de tout cœur…
Le 24 décembre 2018.